Comment cultiver les idées folles ?
Pour Safi Bahcall, c’est la structure
d’une organisation qui détermine sa capacité à cultiver des idées folles, révolutionnaires, d’où sortiront les projets qui transformeront le monde. Cette structure est régie par les mêmes lois que la physique : elle peut être modifiée pour favoriser l’innovation. Apprenez à faire cohabiter au sein d’une même entreprise des entités souples, autonomes et ouvertes, nécessaires à l’éclosion d’idées folles, et des processus plus rigoureux et structurés, permettant de les exploiter efficacement. Vous cultiverez ainsi le cercle vertueux de l’innovation dans la durée.
Qui ne connaît ces histoires : Polaroid, qui a révolutionné l’industrie de la photographie avec le procédé de développement instantané en 1948 a pourtant complètement raté le tournant du numérique quelques décennies plus tard. Nokia, premier constructeur mondial de téléphones mobiles en 1998 est passé à côté de l’explosion du marché des Smartphones dans les années 2000. Et la division dessins animés de Disney, qui a produit entre 1989 et 1994 une série de succès planétaires a plongé dans le box-office les deux décennies suivantes, alors que Pixar cartonnait avec ses films en images de synthèse.
Ce qui est moins connu en revanche, c’est la raison pour laquelle des entreprises louées pour leur sens de l’innovation sont passées à côté d’idées qui ont disrupté leur marché. Parce que leur management les a considérées comme irréalisables, « folles ». Mais comment des équipes, créatives et dynamiques, ayant de multiples innovations réussies à leur actif, ont-elles soudain perdu leur flair légendaire ? Parce que la structure de leur organisation, devenue trop rigide au fil du temps, ne leur permettait plus de repérer puis de développer les projets révolutionnaires explique Safi Bahcall, qui donne des clés pour enclencher le cercle vertueux d’innovation dans la durée.
Ces idées « folles » qui triomphent envers et contre tous
En 1976 le biochimiste japonais Akira Endo découvre que les statines ont la propriété d’abaisser le taux de cholestérol sanguin. Cette « trouvaille » va devenir une percée majeure dans l’avancement du traitement des maladies cardiovasculaires. Elle a pourtant failli être aussitôt enterrée suite à des tests négatifs (erronés) et n’a survécu que grâce à la persévérance d’Akira Endo et d’autres chercheurs passionnés, qui se sont accrochés à cette idée apparemment « folle ». C’est seulement en 1987 que les statines seront autorisées par la Food and Drug Administration et commercialisées avec succès par les laboratoires pharmaceutiques. Selon Safi Bahcall, il en va de même pour la plupart des idées qui révolutionnent une industrie : nombre d’entre elles sont d’abord rejetées, voire tuées dans l’œuf. Celles qui sont épargnées mettent du temps à éclore et finissent par s’imposer
envers et contre tous. Car les projets novateurs ont de nombreux ennemis au sein de votre organisation, voire même de votre équipe : la politique interne, l’incompréhension de votre armée de collaborateurs « soldats » qui gèrent avec discipline les affaires courantes, le manque de crédibilité des novateurs « artistes » souvent déconnectés des contraintes des « soldats » et enfin la difficulté de faire dialoguer les deux groupes pour les mettre concrètement en œuvre les idées neuves. Pire encore : les zélés promoteurs des idées novatrices peuvent eux- mêmes devenir leurs pires fossoyeurs. Ainsi le « visionnaire » trop isolé, tombé amoureux de « son » idée, a tendance à la pousser trop loin, sans garde-fou, provoquant ainsi son échec. Le « Steve Jobs version 1.0. », créateur
du Macintosh en 1984 et fondateur de NeXT Computer en 1988 était un précurseur… mais un piètre chef d’orchestre (à l’époque) : il n’a pas su gérer le travail collectif indispensable au décollage de ses idées.
C’est la structure (et non la culture) qui fait la différence
Extrait de Business Digest N°296, Mai
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