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Interview

Fausses infos vs vraie réputation : mobilisez-vous !

Le Laboratoire Berden a vécu de belles années, avec un PDG porte étendard de l’engagement social, un portefeuille de produits intéressants, des concurrents acharnés sur les réseaux sociaux et des candidats à la pelle… Mais il a été créé à HEC Paris pour et par des étudiants. Pour Ludovic François, co-créateur de ce cas d’école, il est le symbole de la déferlante actuelle des fake news, qui ne doit rien au hasard et dont il est urgent de se préserver.

[highlight_box title= »Biographie » text= »Ludovic François professeur affilié à HEC Paris,
(avril 2019). Docteur en sciences de gestion, Ludovic François est professeur affilié à HEC Paris depuis 2001. Parallèlement à ses activités d’enseignement, il conseille des dirigeants
sur les questions de gestion de crise, de communication d’influence et de management de la réputation. Il dirige par ailleurs deux collections aux éditions l’Harmattan, dédiées aux ouvrages de recherche en sciences de gestion et en intelligence économique.. » img= »https://business-digest.eu:443/wp-content/uploads/2019/04/BD295022.jpeg »]

 

Il s’appelait Eric Dumonpierre. Il dirigeait les laboratoires Berden qui commercialisaient un médicament anti-obésité baptisé Mutorex. Engagé pour l’écologie, apprécié de ses collaborateurs, c’était un patron responsable et respecté. Mais au milieu des années 2000 sa belle réputation a commencé à vaciller sous le poids de révélations embarrassantes : dissimulation d’effets secondaires, exploitation d’enfants, suicides de cadres… Une histoire d’ascension et de décadence classique… sauf que ni Eric Dumonpierre ni les laboratoires Berden n’ont jamais existé. « Toute cette histoire constitue la trame narrative d’un séminaire que nous avons proposé aux étudiants d’HEC Paris pendant près de 10 ans dans le cadre d’un cours sur la réputation d’entreprise et la gestion de crise », révèle Ludovic François. En 2005, lors de la première année du séminaire, le web 2.0 et les réseaux sociaux étaient encore à leurs débuts mais je sentais que ces outils allaient bouleverser les schémas classiques de communication et pouvaient offrir un nouveau terrain d’expression aux techniques manipulatoires…

C’est ce terrain que j’ai voulu explorer en créant un cas destiné à vérifier s’il était possible de créer un environnement suffisamment crédible pour pouvoir diffuser avec succès de fausses informations ».

Quand le fictif cannibalise le réel

Chaque année l’exercice, qui durait trois mois, suivait les mêmes recettes : les étudiants étaient répartis en plusieurs groupes – le laboratoire, un groupe de défenseurs de sa réputation, un groupe d’attaquants, un cabinet de conseil, un fonds d’investisse- ment, des patients, des altermondialistes… Les attaquants étaient préparés mais pas les défenseurs. À un moment donné les attaquants lançaient l’assaut – à grands renforts de posts de blogs, de faux sites ou de témoignages bidons – et les défenseurs devaient réagir. À la fin du séminaire le référencement respectif des contributions des deux camps était mesuré, et ceux qui avaient le plus de références par page avaient gagné. « Quand j’ai lancé ce programme, son intérêt
ne faisait pas l’unanimité parmi mes confrères, sourit Ludovic François. Mais les étudiants ont largement adhéré et les résultats de leurs travaux ont dépassé nos attentes : l’écosystème de fausses informations qu’ils construisaient s’est rapidement propagé ». Ainsi dès la première année il était déjà possible de tomber sur des références à Eric Dumonpierre en utilisant des mots clés génériques tels que « PDG RSE » sur certains moteurs de recherche. Cinq ans plus tard le lien qui arrivait en tête pour la requête Dirigeant RSE menait vers un article entièrement in- venté sur le patron de Berden. « Nous avons aussi reçu de vrais CV de personnes qui voulaient travailler avec Berden et même un courrier d’un laboratoire ayant pignon sur rue, nous accusant de commercialiser le Mutorex sans autorisation ».

Rhétorique, légitimité et crédibilité : des recettes éprouvées

 

Extrait de Business Digest N°295, Avril

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Françoise Tollet
Publié par Françoise Tollet
Elle a passé 12 ans dans l’industrie entre autres chez Bolloré Technologies. Elle dirige Business Digest depuis 1998, société qu’elle a cofondée en 1992 et dont elle a décidé du big move vers Internet dès 1996… avant même d’en rejoindre l’équipe.