Comment (vraiment) organiser votre équipe pour optimiser sa performance ?
Vos équipes doivent-elles conserver un mode d’organisation traditionnel hiérarchique ou devez-vous céder au chant des sirènes de l’entreprise libérée pour plus de flexibilité et d’autonomie ? Selon Sri Kudaravalli, professeur à HEC Paris, la configuration à adopter pour une performance collective optimale ne se décide pas en fonction des tendances ou des traditions, mais en opérant une distinction entre les différents types de missions et la coordination que chacune suppose.
[highlight_box title= »Biographie » text= »Sri Kudaravalli est professeur en système d’information et management opérationnel à HEC Paris depuis 2009. Il a travaillé en tant que consultant pendant près de dix ans aux États-Unis, avant d’obtenir en 2010 un doctorat en systèmes d’information de l’Université du Maryland » button= »LABEL_BOUTON » button_url= »URL_BOUTON » img= »https://business-digest.eu:443/wp-content/uploads/2018/10/BD280-Kudaravalli.jpg »]
Aristote nous a enseigné que le tout est plus que la somme des parties. Et ce principe vaut pour le travail d’équipe, quel que soit le contexte : du terrain de football au bloc opératoire, en passant par l’entreprise. Mais réussir à coordonner différentes compétences et divers niveaux de connaissances pour arriver au Saint Graal de la performance collective n’a rien d’évident. C’est particulièrement vrai dans le domaine du développement logiciel, activité intellectuelle qui mobilise différents types d’expertises. Ajoutons à cela l’évolution constante des technologies, sans oublier le degré d’abstraction des logiciels… et nous comprenons mieux le modeste taux de réussite des projets informatiques établi à seulement 29 % par le rapport Standish 2015. « Pour certains, le développement logiciel est l’une des initiatives les plus complexes entreprises par l’homme », explique Sri Kudaravalli qui s’est penché sur les mécanismes collaboratifs sous-tendant la performance des équipes dans ce secteur. Avec Samer Faraj et Steven Johnson, il a étudié 71 équipes de développeurs logiciels chez un géant américain de l’informatique pour comprendre comment les expertises de chaque membre y était coordonnées. En établissant une distinction entre deux phases clés de tout projet (travail de conception et travail d’exécution), ils proposent de précieux conseils sur la meilleure manière d’organiser le travail collaboratif.
Modèle hiérarchique vs. modèle décentralisé
En matière de développement logiciels, deux écoles s’affrontent quand il s’agit de coordonner le travail d’une équipe : une configuration centralisée, descendante, et une autre plus décentralisée, horizontale. La première s’articule autour d’une personnalité centrale qui prend les rênes de l’équipe et gère la compilation des attentes, l’interaction avec le client, la délégation des tâches, etc. « Le modèle du ‘chef programmeur’, dans lequel les ingénieurs justifiant d’une certaine expérience des processus et des outils sont promus à la tête de l’équipe a eu son heure de gloire et reste encore populaire », explique Sri Kudaravalli. Toutefois, les limites de ce modèle ont fini par apparaître ces dernières années : n’avoir qu’une seule personne pour superviser de vastes équipes crée des goulets d’étranglement. « Il existe une limite à ce qu’une seule et même personne est en mesure de coordonner », commente le chercheur. Depuis une dizaine d’années, des modes de fonctionnement plus décentralisés se sont donc répandus, avec une répartition flexible des rôles et une prise de décision plus collaborative. L’un des concepts populaires de ces structures dites « agiles » est la programmation en binôme : avec non plus un, mais deux programmeurs écrivant le code ensemble. Un modèle censé enrichir le travail de conception et multiplier les chances de repérer les erreurs. Mais là encore, cette approche adaptée aux petites équipes est loin d’être parfaite. En développant les interactions, les difficultés de coordination augmentent également, ce qui peut retarder la prise de décision. « Ce n’est pas un hasard si les organisations devant faire preuve d’une capacité de réaction rapide, comme les forces armées, suivent plutôt une structure hiérarchisée : des rôles et des responsabilités clairement définis sont synonymes de plus grande efficacité, observe Sri Kudaravalli. Dans un bloc opératoire par exemple, chacun des intervenants contribue en fonction de son expertise mais, au final, c’est au chirurgien de prendre les décisions ».
Faire la distinction entre différents types de tâches
Extrait de Business Digest N°280, octobre 2017
D’après une interview de Sri Kudaravalli, professeur à HEC Paris.
Cet article a fait l’objet d’une première publication sur le site Knowledge@HEC (février 2017).
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